Plus les années passent et plus l'Intelligence Artificielle (IA) est utilisée dans de multiples domaines. Elle est également présente au Centre National de Traitement des infractions routières de Rennes pour permettre au système de contrôle automatisé par radars automatiques de verbaliser mieux.
Mieux, et non pas plus, car elle s'attaque aux erreurs qui entrainent des verbalisations indues.
Les erreurs de verbalisations
Chaque année, plusieurs milliers de personnes reçoivent un avis de contravention provenant d'un radar automatique alors qu'ils nont pas commis l'infraction correspondante.
La raison en est que la plaque d'immatriculation du véhicule identifié sur le cliché de l'infraction est bien celle de leur véhicule alors que ce n'est pas leur véhicule qui a été photographié.
Plusieurs causes peuvent expliquer cette situation et dans la plupart des cas, il s'agit d'une usurpation de leur numéro d'immatriculation. Mais il peut également s'agir d'une erreur dans la confection des plaques, d'une erreur lors de la lecture de la plaque sur la photo du radar, d'une erreur de saisie de la plaque dans le système de verbalisation, etc.
Dans ces situations, l'avis de contravention nest pas envoyé au véritable auteur de l'infraction, celui qui figure sur le cliché, mais au titulaire du certificat d'immatriculation renseigné dans le Système d'Immatriculation des Véhicules (SIV).
L'usager mis en cause à tort doit alors réaliser de nombreuses démarches juridiques et administratives pour obtenir la régularisation de la situation en commençant par la demande de la photo de l'infraction puis la contestation de la contravention. Dans le cas d'une usurpation de plaques, il doit également déposer une plainte, faire une demande de ré-immatriculation, etc.
Ces démarches représentent un coût et une perte de temps difficiles à accepter pour le citoyen indûment incriminé.
L'utilisation de l'IA
Pour tenter de limiter ces erreurs de verbalisations en les repérant avant l'émission de l'avis de contravention, le CNT a décidé fiabiliser l'envoi des contraventions grâce à l'IA.
Le but étant d'utiliser des algorithmes de traitement d'image faisant appel à de l'IA basée sur les technologies des réseaux de neurones pour reconnaître sur chaque cliché pris par un radar automatique, la marque et le modèle du véhicule en infraction.
La première étape consiste a repérer tous les véhicules présents sur la photo du radar puis pour chacun d'entre eux, en déterminer la marque et le modèle en précisant le taux de fiabilité de la classification.
Exemple d'une classification marque/modèle
Si cela semble assez simple avec les radars classiques pour lesquels un seul véhicule est en général présent sur le cliché, cela devient beaucoup plus complexe avec les nouveaux modèles de radars, comme les radars tourelles. En effet, comme on le voit sur la photo d'illustration de l'article, les clichés de ces radars ont un champ plus large et il peut y avoir de nombreux véhicules visibles. Mais, le seul pour lequel l'identification est nécessaire est celui qui est en infraction et qui est déjà encadré sur l'image.
Les données de marque et de modèle sont ensuite comparées à celles figurant dans le SIV pour l'immatriculation correspondante. En cas de non-correspondance, ces infractions ne seront pas suivi d'une verbalisation et elles vont donner lieu à un traitement spécifique permettant de repérer l'erreur et d'essayer de verbaliser le véritable contrevenant.
Ces technologies nécessitent une phase d'apprentissage, dite machine learning, qui est d'autant plus efficace que le nombre des données d'apprentissage est grand. Pour cela, les données particulièrement riches des millions de photos enregistrées chaque année par les radars automatiques garantissent la fiabilité du résultat.
L'intégration de ces nouveaux algorithmes dans la chaine de traitement des infractions devrait être effective d'ici la fin de l'année 2019.
Entrepreneurs d'intérêt général
Le développement de ces traitements des données n'est pas réalisé par le prestataire habituellement en charge des systèmes informatiques du CNT mais par deux développeurs, Victor Journé et Cristian Perez Brokate, qui ont été retenus dans le cadre du programme Entrepreneurs d'Intérêt Général dénommé IA FLASH.
Créé en octobre 2016, le programme « Entrepreneur d'intérêt général » (EIG) vise à accélérer la transition numérique de l'État en partant du constat que les administrations veulent mener des projets ambitieux de transformation numérique mais n'ont pas les compétences pointues nécessaires en interne pour les réaliser.
Les divers défis EIG permettent de recruter des profils numériques d'exception aux expertises variées (développement, design, science des données, agilité) pour travailler à l'amélioration du service public proposé par les administrations à l'aide du numérique et des données.
La plupart des développement réalisés dans le cadre des projets EIG sont publiés en "open source" avec parfois aussi des modules de démonstration.
C'est le cas pour IA FLASH, puisque de nombreux codes sources relatifs à ce projet sont disponibles sur le site spécialisé GitHub.
Publié le 22 octobre 2019