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On a tout dit sur eux, on les a pris pour les nouvelles terreurs de la route capables de distribuer des PV à outrance, finalement, 7 ans après, les radars tourelles ne sont rien de plus que de vulgaires radars fixes...
Si encore aujourd'hui, beaucoup de personnes pensent que les radars tourelles sont de supers radars capables de verbaliser plusieurs types d'infraction, c'est qu'ils avaient été présentés comme tels par la Sécurité routière et par leur fabricant.
Tout a commencé lors du Comité interministériel de la sécurité routière du 2 octobre 2015 lorsque le gouvernement a présenté de nouvelles mesures dans l'objectif de descendre en dessous des 2 000 tués sur les routes à l'horizon 2020.
L'une d'entre-elles était très claire:
"Mesure 3: Développer et augmenter le nombre d’infractions constatables par les radars multifonctions (feux-rouges, vitesse, discriminants par type de véhicule, respect des distances de sécurité, détection des dépassements dangereux, franchissement de ligne continue etc.)."
A l'époque, ce type de radar n'existait nulle part dans le monde. La société suisse Multanova avait bien essayé de mettre au point le Traffistar SR590 pour qu'il soit capable de verbaliser jusqu'à 22 infractions différentes mais il s'était finalement contenter de ne surveiller que la vitesse et le franchissement de feu rouge.
En furetant chez les autres fabricants de radars, nous avions alors découvert le Mesta Fusion qui commençait à être mis au point par la société Morpho, à qui l'on devait déjà la majorité des radars fixes installés en France notamment avec le Mesta 210C.
Avec son nouveau radar Doppler tracker multi-cible, le Mesta Fusion présentait toute la technologie pour devenir le premier radar multi-infraction.
Quelques mois plus tard, nous découvrions toutes ses capacités présentées dans une vidéo promotionnelle de Morpho.
Extrait de la vidéo promotionnelle du Mesta Fusion
Tout y était: surveillance des véhicules circulant à faible vitesse, contrôle des distances de sécurité entre les véhicules, surveillance des dépassements interdits par la droite, surveillance de la circulation sur la bande d'arrêt d'urgence, contrôle continu de la vitesse au feu rouge et au feu vert, contrôle des interdictions de tourner à droite/à gauche. Et il y en avait même plus encore lorsque l'on apprenait que le Mesta Fusion était capable de contrôler également l'utilisation du portable au volant ainsi que le non-port de la ceinture de sécurité.
Suite à cela, alors que le Mesta Fusion commençait tout juste a être testé au Kazakstan, la presse s'est emballée sur le sujet et n'en a pas démordu pendant près de sept ans... Dans l'imaginaire du grand public, le Mesta Fusion, finalement renommé radar tourelle en France, est devenu le super radar qui allait faire s'envoler des millions de points permis.
Pour pouvoir être utilisés sur les routes de France, tous les radars doivent être homologués par le Laboratoire National de Métrologie et d'Essai.
La première version du Mesta Fusion a été homologuée dès le mois de mai 2017. Dans ce premier document, on découvrait la structure interne de ces nouvelles cabines mais aucune trace de leur capacité multi-infractions. D'ailleurs, le Mesta Fusion n'était homologué que pour contrôler les excès de vitesse.
Mais le fabricant avait encore du temps pour le faire évoluer puisque le marché public de déploiement des radars tourelles prévoyait une première année de développement technique.
En 2018, 13 premiers radars tourelles étaient installés et le design des cabines avait évolué donc peut-être que leurs fonctionnalités également.
Et ce fut le cas. Lors de l'homologation de cette seconde version du radar tourelle, le Mesta Fusion pouvait désormais être utilisé pour contrôler la vitesse mais également le franchissement de feu rouge mais toujours rien de plus.
Pourtant, en lisant attentivement le certificat d'homologation, on découvrait l'emplacement d'un module d'extension vidéo optionnel qui serait utilisé pour la verbalisation d'infractions via l'analyse des images vidéos.
Organisation interne d'un radar tourelle
Cette fois on se dit que c'est vraiment parti pour le radar multi-infractions et qu'il ne faudra pas attendre longtemps avant que ces nouvelles capacités soient homologuées.
Mais en 2021, le mythe du radar multifonction est définitivement enterré lorsque les autorités avouent que le module vidéo n'a jamais été commandé par l'État et encore mieux, qu'il n'a même pas encore été développé par le fabricant des radars tourelles!
Si l'emplacement du module vidéo est bien prévu à l'intérieur des cabines, il devrait rester vide pour longtemps...
Il restait encore une fonctionnalité qui aurait pu rendre ces radars tourelles quand même plus redoutables que de simples radars fixes.
Lorsqu'un radar tourelle est installé à un carrefour feu rouge, on pensait qu'il aurait la possibilité de verbaliser simultanément les franchissement de feu rouge et les excès de vitesse. Mais ce n'est encore une fois pas le cas!
Dans le dernier document de politique transversale sur le thème de la sécurité routière, il est bien indiqué que, "selon les cas, le radar tourelle peut contrôler au choix, le respect de la signalisation tricolore ou le respect de la vitesse maximale autorisée".
Le contrôle d'une infraction exclut finalement le contrôle de l'autre et le radar tourelle n'est donc qu'un simple radar feu rouge lorsqu'il est installé à un carrefour avec feux tricolores et un vulgaire radar fixe lorsqu'il est installé sur le bord des routes...
Bizarrement, l'absence de cette double fonctionnalité ne semble pas un problème technique, puisque les brochures commerciales du Mesta Fusion précisent bien que le radar peut contrôler ces deux infractions simultanément. Il s'agit donc plutôt d'une limitation réglementaire voir politique qui pourrait donc être levée à l'avenir.
Extrait d'une plaquette publicitaire du Mesta Fusion
Le Mesta Fusion peut être configuré pour ne contrôler que la vitesse ou que le franchissement feu rouge mais également pour ces deux infractions simultanément lorsque le feu est vert (speed on green light) et lorsque le feu est rouge (speed on red light)
Allez, pour finir, voici une dernière fonctionnalité qui semble également être passée à la trappe. Lorsque le marché public de déploiement des radars tourelles avait été présenté, on avait été surpris de voir que SNCF Réseaux y était associé. En fait, il s'agissait d'utiliser les radars tourelles installés aux abords des passages à niveau pour détecter la présence d'objet sur les voies, un véhicule arrêté par exemple.
Mais cette fonctionnalité n'a plus jamais été évoquée depuis... On ne sait pas si c'est à cause de son développement technique qui a été impossible ou si les objectifs de la Sécurité routière ont changé entre-temps En tout cas, à ce jour, il n'y a que trois radars tourelles qui surveillent le franchissement de passage à niveau et ils ont tous été installés en 2018 lors des premiers tests en conditions réelles de ces nouvelles cabines.
Un des trois radars tourelles installés à un passage à niveau